Du 22 octobre au 1er novembre 2019, un chantier-école inédit s’est déroulé au temple de Gongshutang, dans la province du Shaanxi, berceau de la civilisation chinoise. Pendant 10 jours, une équipe de l’Institut national du patrimoine a eu la chance d’accéder à ce temple Ming situé dans un village du comté de Huxian, à environ une heure de route de Xi’an, où l’on sent l’attachement de la population locale à ce patrimoine et l’intérêt des parties prenantes en charge de sa conservation.
Cette coopération franco-chinoise impliquait des élèves restauratrices en spécialité peinture et des professionnels chinois du patrimoine exerçant dans des institutions de la province du Shaanxi et de toute la Chine : musée du palais (Cité interdite), musée de Nankin, Institut du patrimoine et d’archéologie de Chengdu, Institut du patrimoine et d’archéologie du Zhejiang, université des sciences et technologies de Pékin. Un car était mis à disposition par la partie chinoise pour aller sur le site autant que nécessaire. Certaines sessions de la formation ont été accueillies dans l’Institut de protection du patrimoine du Shaanxi, à Xi’an.L’Institut national du patrimoine et l’Institut de protection du patrimoine ont mis en place cette formation dédiée à la protection du temple de Gongshutang avec le soutien de l’Ambassade de France en Chine et de la Fondation des sciences du patrimoine depuis 2017.
Ce chantier-école exceptionnel a été lancé officiellement à l’occasion du 30e anniversaire de l’Institut de protection du patrimoine du Shaanxi, les 18 et 19 octobre 2019, en présence de hauts responsables du patrimoine de la province du Shaanxi et de toute la Chine.
Cette expérience pédagogique fut couronnée d’un franc succès grâce à une longue préparation : organisation de trois missions de prospection sur place, implication des enseignants, de la direction des études du département des restaurateurs, des relations internationales et des équipes administratives de l’Institut national du patrimoine, accompagnement d’un interprète professionnel formé au vocabulaire du patrimoine et présence permanente d’une experte technique internationale à Xi’an pour favoriser la réussite de ce projet. Toutes les conditions ont été réunies pour favoriser autant que possible une qualité et une précision des échanges, le résultat humain et professionnel à l’échelle de ces quelques jours ayant dépassé les espérances des deux parties.
Durant la formation, les équipes françaises et chinoises ont travaillé ensemble au projet de conservation du monument, encadrées par Claudia Sindaco, restauratrice du patrimoine et assistante de la responsable de la spécialité peinture au département des restaurateurs, et par Anne Jacquin, restauratrice mobilier spécialisée en laques extrême-orientales.
Les professionnels présents ont partagé leurs connaissances et réfléchi au projet de conservation global de ce trésor insigne de l’époque Ming (construit vers 1403-1424), tout en progressant sur un constat d’état des décors polychromes variés et d’une grande complexité. En effet, sur la structure de bois du temple sont conservés des décors peints et laqués, d’un raffinement extrême, qui témoignent de techniques oubliées, citées dans les traités anciens et dont aucun autre exemple n’est conservé.
Outre le constat d’état poussé des décors, la formation a permis un échange de cours théoriques et pratiques, en lien avec les problématiques du lieu. Certaines de ces sessions ont été organisées au plus près du temple, dans l’hyperstructure qui a été construite et aménagée en 2019 pour protéger le bâtiment.
L’Institut national du patrimoine est d’ores et déjà sollicité pour son expertise dans la pédagogie de formation des restaurateurs du patrimoine et pour l’organisation d’autres sessions de formation, en France et en Chine. Il est par ailleurs consulté pour a mise en place d’un cursus initial de formation des restaurateurs en République populaire de Chine.
Tout au long du chantier-école, les participants chinois ont exprimé leur intérêt pour la méthode et la rigueur scientifique appliquée par l’équipe française. Ils ont ainsi découvert le profil « chercheur / restaurateur » des étudiants et enseignants de l’Inp, à travers leur approche scientifique associée à leur connaissance pratique des techniques anciennes. " Le chantier-école franco-chinois va être mentionné dans « Wenwu » 文物 (Bien culturel), revue de référence depuis 1959 dans le domaine du patrimoine."